des gris

     Tout peintre a déja tenu un petit gris, ce pinceau formé des poils du ‘petit gris’, écureuil du nord de l’Europe qui fournit aussi le vair des héraldistes. Mais le peintre oeuvre-t-il en gris pour autant ? La difficulté est grande d’animer la toile par des gris, la baie par une grisaille.

vitrail à allure de grisaille

dans l’église de Glennes (02) l’Atelier rémois J. Simon a réalisé ce vitrail protégé en arrière par un grillage qui lui donne une allure de grisaille, ce qu’il n’est pas.

     Quand le peintre appelle un gris mille s’approchent. Ils sont riches, chauds ou froids. Certes ajouter du blanc au noir donne un gris, fade et qui va tirer vers la teinte qui a permis de donner le noir, un noir forcément particulier et non un noir absolu. C’est pourquoi on peut pratiquement écrire que la majorité des peintres peignent en gris colorés séparés par quelques teintes primaires pures. 

     La souris peut être grise, la taupe et la musaraigne également ainsi que nombre d’animaux.

musaraigne

     Sorex araneus L., la musaraigne ou musette (ci-dessous) appartient à la famille des soricidae ; longue queue et museau de même animé de vibrisses et se terminant presque en trompe. Agile et rapide vous la repérez facilement dans l’herbe du jardin à la recherche de nombreux insectes.

  La prochaine fois que vous verrez un gris, pensez qu’il n’y en pas deux pareils et essayez de préciser sa teinte. Le métal délivre de jolis gris, voyez cet étain et cet argent mis en  médaille et pièce.

médaille d'étain

ici l’effet de lumière inverse le volume : on voit en creux ce qui est en relief ! Sans être gris pour autant…. Médaille d’étain réalisée à l’occasion de la naissance de notre aîné.

Ci-dessous des gris chauds animent les reliefs poinçonnés d’un denier de Charles VI :

pièce de monnaie dite 'gros' du roi Charles VI

     L’exercice est tentant, effectivement, de peindre en gris. Un jour d’été, en plein soleil, sur le versant sud d’une de ces collines de la Montagne de Reims si apte à l’élevage des trois cépages réservés au champagne je me suis entraîné à cette forme d’expression si chère à tant de grands peintres -Morandi, Le Greco, Millet, Cézanne,  noms qui m’arrivent sur le champ en mémoire et ouvrent l’une de leurs oeuvres avec abondance de gris. Voici le résultat exprimé au pastel tendre sur fond de papier gris bleuté sur lequel vibrent et miroitent nombre de gris argentés qui évoquent la vapeur chaude faisant danser les images au midi caniculaire. Mirage de gris que même les Mirages gris de la B.A. 112 de Reims ne parviennent à disloquer dans leur vrombissement de flèches d’acier. Brisant parfois le mur du son ils font momentanément éclater la pacifique beauté de l’ordonnancement de cette bourgade proche d’Ay et d’Epernay au pied du Val d’Or, bordée par le ruisseau de la Livre que naguère Berthe avait fait jaillir. Touches colorées qui éclatent à la surface du gris, harmoniques sonores qui s’échappent du verre quand, en fête et en liesse, mille bulles diffusent vers le monde entier le nom de ma Champagne. J’aurai bien l’occasion de revenir vers ces bulles un autre jour et d’ici là je vous souhaite, amis lecteurs et fidèles lectrices une soirée à l’esprit festif à laquelle la couleur grise n’est pas généralement associée. D’où la sottise de ce blog sans queue ni tête.

Avenay, pastel JPB

8 réflexions au sujet de « des gris »

  1. jeandler

    Le gris n’est pas une couleur. Une intensité de lumière, plutôt. Un dégradé. Sous le gris, perce toujours une couleur. Les plantes qui s’y connaissent en matière de pigments, ne connaissent pas le gris contrairement à certains animaux. Quand ils se « grisent » c’est qu’ils se dégradent et meurent.
    Le célèbre portrait de Picasso par Juan Gris serait une belle illustration de cette note.

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  2. voirdit

    On pourrait beaucoup discuter du gris comme couleur et il en serait de même dans une certaine mesure, du blanc et du noir. Votre référence à Juan Gris, ‘Portrait de Picasso’ est tout à fait judicieuse et merci de me la proposer. Les lecteurs intéressés trouveront ce portrait, entre autre sur Wikipedia.

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  3. Mathilde

    Quelle extravagance , cher JP , de parler des gris alors que le ton convenu des blogs est , a contrario de nous submerger des couleurs de l’automne ( bien sûr , vous aurez compris que je plaisantais et que faire preuve d’originalité est à mettre à votre crédit o:) Bref , des gris il suffit simplement de lever les yeux et de regarder le ciel se tacher de ces dégradés en gris majeur , pour admettre que cette couleur , loin d’être terne ou friable , s’étoffe  » en statues de neige et d’air , échangeant leurs formes sans hâte , tandis que des îles de suie et d’argent heurtent et mêlent mollement leurs rivages  » *

    * Gustave Roud

    Belle journée ( et pardon pour le smiley qui ne manquera pas de s’afficher plus haut , mais j’assume !)

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  4. Jacques Dalpé

    Merci d’être passé me voir par hasard

    Je suis le cousin québécois, comme on dit à l’occasion. J’ai un fils auteur-compositeur interprète qui s’apprête à traverser l’Atlantique pour un mois. Sa copine d’origine français,(Haute-Savoie) fera le voyage avec lui. Paris, l’Allemagne feront partie de leur parcours.

    J’ai bien aimé ce que j’ai vu ici. Belle culture! Puisque le hasard a voulu que je vvienne faire une détour ici par hasard, je mets votre blogue dans mes favoris au moins le temps de mieux le connaître.

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  5. Ambre

    Je fais un détour par votre blog via celui de Mathilde et votre éloge du gris m’interpelle . Le musée des Augustins à TOULOUSE , a consacré un expo à ces peintres du gris , dont beaucoup l’ont utilisé dans l’art du trompe- l’oeil ..
    La grisaille , création essentiellement basée sur un jeu de valeurs , est héritée de la fresque, les peintres y trouvent là une possibilité de rendre les effets de sculpture .On imagine mal à quel point il est difficile de révéler cette nuance , privée de la séduction de la couleur.. pas de couleur , juste la nuance ..
    A noter Rubens et sa « Résurrection du Christ » où le peintre excelle dans la nuance des gris, des blancs et des drapés.
    Plus tard cette grisaille évoluera vers le dessin à l’huile préparatoires à de grandes compositions .. ( l’enlèvement de Prospertine par Boucher est un ex.)

    http://www.latribunedelart.com/Expositions/Expositions_2008/Rubens_Resurrection.htm

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  6. voirdit

    « …des îles de suie et d’argent … » quelle belle expression très appropriée avez-vous dénichée là Mathilde pour enrichir mon propos ! Elle me donne envie de lire G. Roud que je ne connais pas hélas.
    Vous avez bien raison d’assumer le sourire de connivence de votre smiley qui participe à l’expression contemporaine et qui ne la dénature en rien, du moins ici sur un blog. Bonne soirée et à bientôt pour un autre commentaire sans doute très judicieusement arrangé, JP

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  7. voirdit

    Très aimable à vous cher cousin québécois de venir me saluer par vos lignes amicales. Que l’Europe de l’ouest soit accueillante à votre fils et son amie ! Merci de bien vouloir examiner plus en détail le contenu de mon blog et de mon côté j’attendrais d’éventuels commentaires de votre part tout en jetant un coup d’oeil de temps à autre sur votre production.

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  8. voirdit

    pour Ambre,
    Vos justes réflexions montrent bien la filiation entre fresque, trompe-l’oeil et peintres du gris en général. Souvent le peintre utilise des gammes de gris par attirance personnelle et pour mieux marquer des oppositions de couleurs complémentaires en vertu des lois de l’optique et de la physique ; il ne veut pas forcément peindre à partir de gris, ou traiter en gris un sujet que d’autres traceraient en couleurs vives. Les réflexions que les uns et les autres ont laissé dans leurs traités ou leurs correspondances révèlent parfois ce fait.
    Merci de votre visite et peut-être à bientôt, JP

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