Ronde d’avril 2016

J’ai grand plaisir d’accueillir ce mois une réflexion de Jacques, « Un promeneur » sur le thème « Fenêtre(s). Notre ronde tourne selon ce cercle de liens :

Guy :  Emaux et gemmes des mots que j’aime   http://wanagramme.blog.lemonde.fr/
Elise : même si,    http://mmesi.blogspot.fr/
Céline : mes esquisses,   http://mesesquisses.over-blog.com/
Dominique : la distance au personnage,   http://dom-a.blogspot.fr/
Franck :  quotiriens,        http://quotiriens.blog.lemonde.fr/
Jacques  : un promeneur,    http://2yeux.blog.lemonde.fr/
Jean-Pierre : voir et le dire, mais comment ?  http://voirdit.blog.lemonde.fr/
Noël : le Talipo ,  http://www.talipo.fr/
Hélène : simultanées,  http://simultanees.blogspot.fr/

Suivons notre « Promeneur » :

   Il y a ce bruit amer, grinçant, râle et soupirs de l’arrivée du train à Túpïnk sous le ciel raide , acier, il a vu au bord des rails, ces murs rougis, rouillés, et ressenti le caractère inéluctable de ce voyage peut être inutile vers l’oubli. Très vite ensuite ses pas qui sonnent dans des rues, leur rythme ample puis hésitant et parfois les arrêts quand Markovski lit le nom des rues au carrefour, puis revient au plan qui se déchire entre ses mains, puis de nouveau lit le nom, novice dans cette langue barbare qui blesse les lèvres, syllabes ferrailles. Ne pas vouloir interroger les passants de rencontre, user quand il le faut de quelques mots d’anglais, éviter les grandes rues, se méfier des caméras et des gens : souvenez vous de ça  ils savent remonter  n’importe quelle piste

(et aussi) ce souvenir qui flotte, saigne, blesse : elle autrefois loin dans l’espace et le temps, elle et lui plus jeunes, tellement plus jeunes. Ce souvenir qui raye les flancs  de sa mémoire, l’empêchant de passer à autre chose, faisant barrage (la masse brune de ses cheveux, de son corps ample, nue  et souriante qui s’avance : neuf ans …

RondeAvril2016Photo3WIls savent tout

Ne me demandez pas comment

& cet accent étrange  qui plus que tout lui plaît chez les femmes, comme une différence plus grande encore plus attirante (alors que celles d’ici, leur sécheresse, l’ abominable mimétisme appris à l’école, cette ribambelle de  portraits fin de siècle, décalques de visages avec leurs foulards vert ou bleu pâle, celui des filles de la côte, des vallées de la Knerre, ensuite dans l’autre pièce celles du plateau. Tandis qu’elle, solaire, espagnole ; Sotomayor

Un homme traverse une ville de la province du nord-est : c’est une fin d’hiver, il doit retrouver une femme et la tuer. Est-ce pour le compte d’un autre qu’il doit agir ? Ou bien a-t-il simplement besoin de la revoir une dernière fois pour peut-être tuer en lui-même le souvenir, ou encore s’agit-il  de renouer avec elle, oubliant que c’est lui-même qui a rompu le lien de leurs années d’études ?

RondeAvril2016Photo2Wle trajet de la balle # 1 : orifice d’entrée à 2 cm en DD de l’omoplate D, perfore l’Alexandre pulmonaire, ricoche sur la face interne du sternum, traverse le ventricule D et termine dans la plèvre inf D ; projectile #2 : entrée 25 cm en dessous du #1 fracture le pôle sup du rein D puis cisaille le lobe inf. du foie, trajet légèrement ascendant, montrant que la victime était en train de chuter lors de ce 2nd impact pour atteindre la ville, la route à voie unique serpente à travers d’immenses rouleaux de brume froide que le vent d’Ouest fait monter sur les contreforts boisés jusqu’à la crête où ils se tiennent un instant en équilibre pour dévaler ensuite, disparaissant dans le vide bleuté vers la zone industrielle du Platt, alors qu’au dessus, le ciel de l’aube devenait orangé puis rose alors que S. dormait maintenant la tête appuyée sur son épaule, et derrière la petite jouait silencieusement avec de figurines en bois peint, animaux aux visages presque humains mimant la colère, le rire, l’étonnement, la peur ou le sommeil,etc.

Un personnage hypermnésique

Avec le temps son visage défait: des sourcils restés sombres mais des tempes blanchies, annonce d’une défection de la chair, de forces en diminution, rongées par le temps pense-t-il en se regardant dans le miroir des toilettes de la gare de  T… (divers procédés chez les peintres comme Samuel Desogues (1760-1791) dont on sait qu’il fut amputé du bras droit, qu’il reprit par la suite la peinture, exclusivement de série d’autoportraits peints  de la main gauche mais tous anatomiquement faux (l’ensemble de ses tableaux antérieurs disparus ou probablement attribués à tort à …)

Mais alors que pensez vous de la philosophie ?

– ye pinse elle ne dicrit pas le monde réel, comment dire, elle …

– vous avez écrit que le roman surpasse la philosophie parce qu’il montre une pensée en action

– ye pinse touyours la même chose

Les caméras enregistrent tout : carrefours allées  de magasins, gares (des wagons jaunes), l’ensemble des véhicules de location équipés de puces de géolocalisation si bien que tous les moyens de transport etc. (étincelles vertes au contact  des caténaires)

le ANG 23 est de fabrication tchèque, un 9mm à  balles ogivales blindées de 9×19 mm, avec une crosse en alliage d’aluminium bleuté, et une coque arrière en polymère moulé, les premières séries furent problématiques du fait d’un défaut dans l’acier utilisé, et qui rendait l’arme impropre à fonctionner lors de changements rapides de température

pensez que le livre ne s’arrêtera jamais et qu’on écrit sans arrêt jusqu’à la catastrophe finale : songez à  ce travail de Pénélope ou d’un architecte malade qui ferait et referait sans cesse le tissu la ville : son centre, les avenues puis jusqu’au plus petit quartier périphérique, jusqu’aux confins où quelques demi-paysans élèvent des poules et des lapins : clapiers de banlieue qu’on atteint en tram après deux heures de secousses métalliques, et aussi évitez une identification possible des lieux, circonstances où des personnes, pensez que les pages ouvertes pourraient être des fenêtres d’où on pourrait voir la multiplicité des visages du monde, millions de possibles issues et chemins

Les deux coups de feu ont été tirés depuis l’extérieur du bâtiment dans une certaine précipitation : l’inspection de la chambre ne révélera aucun détail particulier : au mur une photographie noir et blanc d’un port grec dans les années 60 (Hydra ?) où plusieurs chats sont assis le regard fixe dans la direction d’un bateau qui arrive, dans une attitude de sphinx, et sur le dessus de lit satiné la gigantesque tache de sang qui rappelle vaguement une carte de la Pologne, par on ne sait quelle transformation chimique tout ceci a pris en quelques heures une couleur noire

Ils savent tout

Il hésite :

Markovski (M) est en fait un agent des services secrets turcs : la raison du meurtre – le mobile si on veut – est de provoquer la colère des arméniens de France car Christina Boghosian (B) est considérée comme proche d’une organisation paramilitaire, et sa disparition devrait amener les dirigeants à sortir de l’anonymat et donc à quitter la protection de l’état français

  1. Le mobile du meurtre est une dette de jeu qui reste impayée, le père de B et celui de M ont tous les deux été de riches entrepreneurs sur la Côte d’Azur quelques années auparavant
  2. ou bien il est question d’une transaction malhonnête puisque un terrain à été acheté à bas prix pour construire un ensemble social alors le projet final comporte des hôtels de luxe et un complexe de bureaux pour une sorte d’hôtel d’entreprises

« The war for the preservation of the union » (il entend whore – preservative – onions) et regarde la jeune fille en sweat-shirt au nom de la Grande Université qui bavarde et ondule , agile et spirituelle, légère, mutine et agaçante avec devant elle des visages asiatiques de tous les âges attentifs et occupés, terriblement sérieux , Mon Dieu que la whore est jolie !

Elle était morte ensevelie dans le sommeil, la ville aussi ensevelie, assommée sous des masses de nuages qui roulaient, Rubens ou Boucher etc.

la liberté de tout dire ou seulement un peu

Sur la droite des maisons de meulière, un long viaduc à quatre arches, une pente vertigineuse et des reflets de verre glauque et d’aluminium à chaque extrémité du bâtiment une élévation vitrée au toit tronconique, au loin quand la brume se levait on voyait la colline de V.

Il parle doucement puis sa voix enfle, il crie je ne veux plus jamais te voir JAMAIS TU M’ENTENDS JAMAIS JAMAIS PLUS JA elle le regarde méprisante , comme un authentique malade puis tourne le dos et s’en va

Ils savent tout d’avance, mais vous gardez le pouvoir de dire, vous êtes propriétaire d’un peu de silence.

RondeAvril2016Photo1WDans le même temps, grand merci à Noël Bernard, « le Talipo » de nous accueillir en ses pages, et aux organisateurs de cette ronde de permettre cet échange.

Liste des blogs ayant participé à cette ronde :

 

Une réflexion au sujet de « Ronde d’avril 2016 »

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