Ronde de septembre 2018

Notre ronde épistolaire bimensuelle tourne ce mois-ci inspirée par le mot « arbre(s) ».

J’ai le plaisir d’accueillir sur cette page les réflexions originales libérées de Joseph Frisch   [ https://jfrisch.blog/] et pour ma part je suis aimablement hébergé chez Noël Bernard, du blog ‘le Talipo’ [http://cluster015.ovh.net/~talipo/]

Le gardien

15 septembre                                                                                                                                         La nuit même du départ de Marie, j’imaginai la trame de plusieurs romans, dont hélas le sommeil a consumé l’essentiel, me laissant entre les bras le charbon du rêve avec un goût d’inachevé, le sentiment que procurerait la lecture d’un indicateur d’horaires de train dont on ignore l’ancienneté ou les destinations, ou encore l’ incompréhensible dessin de pattes d’oiseaux sur un champ de neige. Au moins ce rêve n’est il pas un cauchemar.

Je me suis levé vers quatre heures, j’ai fait quelques pas autour du cèdre, aperçu, deviné, le vol de la hulotte qui s’est enfuie silencieuse et claire.

Au potager tout a séché; j’ai eu beau vider le puits, n’ai réussi qu’à ralentir l’échec.

17 septembre                                                                                                                                        Pas un seul visiteur ou si : quelques renards, dans le lointain au crépuscule. J’écoute du jazz sur le lecteur CD. Chaleur étouffante.

20 septembre                                                                                                                                 Dégagé à la main l’herbe qui poussait entre les osiers. Il s’agit de tenir chaque poignet d’herbe de la main droite et de sectionner de l’autre main la base de la touffe. Au bout de vingt mètres de ce travail j’avais la tête qui tournait, les oreilles qui sifflent. À l’est du champ, un peuplier foudroyé il y a des années semble refaire ses forces. Aucun visiteur depuis plusieurs jours, j’ai quand même allumé la radio vers sept heures. Il pleuvra demain, une journée de répit pour l’arrosage de la pépinière.

21 septembre                                                                                                                                           Il pleut comme prévu, je consacre la matinée à dormir plus tard. Le cri d’un faisan me réveille, on m’a dit que cette année on ne chassera que les mâles. Dans le pré derrière vu une mère et cinq petits.

22 Septembre                                                                                                                                       Feu avec le petit bois du figuier, qui date de l’an passé. C’est comme si son parfum se réveillait après un long sommeil.

23 septembre                                                                                                                                    Après plusieurs jours d’hésitation je suis descendu à Combes, oubliant que nous sommes dimanche. Il était si tôt que seuls la boulangerie et le café tabac étaient ouverts. J’ai eu envie de recommencer à fumer pour passer inaperçu, me cacher, comme j’ai toujours voulu faire (autrefois caché derrière un appareil photo). Personne ne me connaît pourtant; alors qui craindre ? Peut-être craindre ma réaction si l’un ou l’autre me parlait, ma colère, ma fuite, l’espèce humaine en général, les journalistes et les juges en particulier.

25 septembre                                                                                                                                     …les feuilles sont alternées, simples, grandes, presque aussi larges que longues (18 à 25 cm), palmées, divisées en trois à sept lobes plus ou moins échancrés, de consistance ferme longuement pétiolées ; elles ressemblent à celle des érables, qui, elles, sont opposés. (page 339)

26 septembre                                                                                                                                    Dans le foyer, outre une biographie de Montaigne hors d’âge ; un « Larousse des arbres » gonflé d’humidité comme s’il avait passé un mois dans une étuve , plusieurs polars (« J’étais Dora Suarez » de Robin Cook, « Manhattan transfer » dans une version illustrée, plusieurs livres de Simenon.

1er octobre                                                                                                                                          C’est parce que les autres sont mes semblables que je les supporte mal.

3 octobre                                                                                                                                        Quatre mois exactement que j’ai quitté la prison de Béthune, le départ était une simple formalité ; la porte qui s’ouvre et j’entre avec douleur dans un monde qui me fut familier. Tous sont devenus des étrangers.

5 octobre                                                                                                                                                 Je vais d’un endroit l’autre de l’arboretum, beaucoup d’arbres ont commencé à perdre leurs feuilles, dans la soirée sur un petit monticule au dessus de l’étang on voit au loin un front de peupliers blancs éclairé par le soleil couchant : blancs ? non, vert beaucoup plus pâle que les saules puis derrière en arrière-plan, l’allée des cèdres.

7 octobre                                                                                                                                                 Je suis redescendu en village tout aussi nerveux que la dernière fois, J’ai l’impression de marcher comme une araignée, sans arrêt sur mes gardes. A retour pendant deux heures j’ai rêvé sur une carte du Japon, suivant le dessin des côtes avec le stylo, je lisais des noms qui n’ont plus cours puis je traversais le détroit de Corée, j’imaginais-les îles, etc.. Je voyage très bien sans avion. Relire La Folie Almayer.

Ai arrosé la pépinière.

10 octobre                                                                                                                                                Il ne suffit pas que l’erreur judiciaire soit reconnue ; Il faut ensuite réparer tout le temps qui a été ôté à une vie, mais personne ne s’y attaque c’est trop difficile. L’avocat dit qu’il y aura une compensation financière : la belle affaire ! Erreur non !! FAUTE JUDICIAIRE… Naufrage.

… la femelle se fixe sur les rameaux comme une sorte de verrue violacée ; autrefois récoltées, ces cochenilles, désignées sous le nom de grains d’écarlate, servaient à la fabrication d’une très belle teinture rouge; le mot kermes apparu pour la première fois en notre langue chez Rabelais en 1546 sous la forme al kermes est lui-même une transcription de l’arabe al–qirmiz, d’origine persane car ce sont les Persans qui utilisèrent les premiers cette teinture. (page 381) …

13 Octobre                                                                                                                                         Cette fois je suis descendu à vélo, par Combes jusqu’à Revières et autour du lac en bas, jusqu’à la frontière française, j’ignore s’il y a eu des visiteurs, mais le portail de l’arboretum était resté ouvert. Les champs resplendissent de l’or des hêtres.

15 Octobre                                                                                                                                    Fausses accusations, emballement de ces ordures de journalistes, faits divers : toutes les nuits malgré les mois passés il y a un moment où le jour de l’arrestation revient, avec des variantes sur le lieu, la lumière, etc. mais chaque fois c’est précédé d’une sorte de crissement de cigales qui l’annonce. Reçu une courte lettre de Marie qui revient dans une semaine.

J’aime ce travail loin des gens, dans la solitude, sauf qu’à y réfléchir je suis moi aussi devenu le gardien d’une petite foule, d’arbres certes et libres si on veut.

17 Octobre                                                                                                                                                Il est tard dans la saison et cependant sur un des ronciers près de l’étang il y a encore une quantité de mûres que j’ai cueillies. Quelques abeilles butinent encore, la lumière est plus franche maintenant que l’air du soir fraîchit. J’ai lu à haute voix, un vieil article de journal, après quelques essais il m’a semblé arriver à un résultat correct. Çà me rappelle les exercices d’il y a trois ans avec les élèves du groupe de théâtre.

Ce mois notre ronde évolue suivant ce mouvement :

Marie-Noelle Bertrand
chez Joseph Frisch https://jfrisch.blog
chez J Pierre Boureux http://voirdit.blog.lemonde.fr
chez Noel Bernard http://cluster015.ovh.net/~talipo/
chez Hélène Verdier  http://simultanees.blogspot.com
chez Franck Bladou https://alenvi.blog4ever.com/articles
chez Giovanni Merloni https://leportraitinconscient.com
chez Marie Christine Grimard https://mariechristinegrimard.wordpress.com
chez Dominique Autrou https://ladistanceaupersonnage.fr
chez Dominique Hasselmann https://hadominique75.wordpress.com
chez Guy Deflaux http://wanagramme.blog.lemonde.fr
chez Marie Noelle Bertrand http://ladilettante1965.blogspot.com

 

 

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