Mi-avril au Chemin des Dames

en sous-bois, PaissyChaque année la magie du printemps opère en ces sous-bois lumineux encore ponctués de verts tendres, en ces ravins moussus bruissants d’eaux vives, en ces entrées de carrière et creutes redevenues fraîches.

fontaine

Le ramier choisit de fines branches, envie de bâtisseur, instinct d’éleveur, appel sensuel dans un fracas d’ailes claquantes

ramier

Cette année le morillon (Mitrophora semilibera) abonde, drôle de coiffe et plus encore, et pied granuleux vers le sommet. En groupes.

Mitrophora semilibera ou Morillon

Mi-avril sur ce Chemin des Dames ne peut passer sans rappel des trépassés de ce sanglant printemps 1917. Lisons et relisons le désespoir, les souffrances, la mort partout. Cette année je vous livre un passage de Georges Gaudy extrait de : Le Chemin des Dames en feu (décembre 1916-décembre 1917), souvenirs d’un poilu du 57e d’infanterie, Paris, Plon, 1923.

« [Beaurieux] Cette bourgade aux toits crevés me parut, durant une semaine, un asile délicieux. Le printemps l’égayait. Personne certes ne pensait à la tuerie prochaine. Les hommes dormaient, le ventre au soleil , dans les jardins pillés et piétinés. La rivière n’était pas loin. Elle étendait ses flaques bleues dans la fraîche prairie. Des poilus, sous l’ombre des feuillages légers, allongeaient près de la rive leurs corps nus et bruns, livrant leurs peids meurtris à la caresse de l’eau. » 

Demain à l’aube une détonation fera mémoire de tout cela, de cette tragique « Heure H », lancera paisibles à l’assaut des crêtes pacifiées ourlées de pins des troupes de marcheurs. Au soir, dans le cimetière de Craonnelle ponctué de mille lucioles s’élèveront les chants rythmés d’une chorale venue d’ailleurs. Ainsi sont et résonnent nos « 16 avril » depuis quelques années, comme une litanie douce et amère dans l’éveil du printemps.

« Viens dans les prés , le gai printemps

fait frissonner les vastes chênes,

l’herbe rit, les bois sont contents,

Chantons ! Oh! les claires fontaines ! »

Victor Hugo, Les chansons des rues et des bois, -IV pour d’autres, IX. Hauteville house, octobre 1865.

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