Le gros porteur maintient sa suprématie dans les airs, de plus il est puissamment armé. Par chance pour ses proies il semble ne pas les détecter de loin. Dans un bruit soutenu de bi-moteurs à hélices il sillonne l’espace de cônes en cônes, sans programmation de vol arrêtée. La proie touchée il tente de s’en emparer mais le plus souvent c’est l’échec. Toutefois quelques agressions font mouche. Le frelon (Vespa crabro), car c’est de lui qu’il s’agit, notre frelon indigène et non l’asiatique en cours d’expansion sur le territoire, tombe alors au sol avec sa proie. Un coup de dard venimeux probable et l’ennemi est hors de combat instantanément. Commence alors le dépeçage. Les ailes sont découpées à leur point d’attache et finissent dans l’herbe, ce qui signale d’ailleurs à l’observateur averti la fréquence et le nombre approximatif des prises.
Dans un second temps le frelon gagne une position perchée, de préférence au sol enherbé qui le dérange dans ses manoeuvres , emporte avec lui le corps sans tête et sans ailes du papillon, c’est-à-dire le thorax et l’abdomen. Accroché à son support le frelon broie et aspire alors les entrailles du lépidoptère à grande vitesse, la scène entière se déroulant sur un temps d’environ trois à cinq minutes, selon dérangements ou obstacles imprévus :
Ne reste plus au final qu’une aile perdue d’un aéronef bien inoffensif qui n’a nullement la maîtrise des airs et ne dispose que de la fuite pour échapper à l’ennemi.
Ici une aile de Petite tortue, fragment dérisoire de ce combat aérien discret qui se déroule sous nos yeux chaque jour d’été. Encore faut-il que la tour de contrôle soit aux aguets.
Pour ce qui est du gros porteur il affectionne certains endroits pour établir son nid dans lequel les larves attendent leur repas que l’insecte adulte leur apporte sous la forme d’une bouillie obtenue comme on vient de voir et régurgitée. En général il construit dans un arbre creux, une cavité, plus rarement un grenier. Son nid est très fibreux, composé à partir d’écorces de bois triturées ; il ne comporte pas de cellulose de papiers divers comme celui de la guêpe commune. Lors de nos campagnes de fouilles je me chargeais de détruire les amorces de nid que les frelons prenaient plaisir à accrocher sur la toile de nos abris ‘marabout’ en épaisse toile odorante, comme on peut le constater ci-dessous :
On peut voir que la ‘maternité’ du frelon comprend un premier niveau et qu’un second étage vient d’être ajouté, il ne compte encore que quelques cellules. Regardez au fond des cellules supérieures : des oeufs sont visibles au fond de chacune.
Au bout de quelques semaines les larves bien nourries ferment leurs cellules et plusieurs jours plus tard l’insecte adulte grignote le couvercle et s’échappe alors du nid petit à petit pour mener sa vie de frelon. Des femelles passeront l’hiver dans un abri et au printemps le cycle de vie reprendra garnissant l’espace de ces aéronefs que l’on craint à juste titre et bien que leur piqûre ‘ordinaire’ ne soit pas plus dangereuse que celle d’une guêpe. L’insecte est un grand prédateur de proies diverses et a son utilité. On peut cependant ne pas avoir envie de voisiner trop près de ces terrains d’aviation quand ils sont trop fréquentés.
J’ai noté, lorsque j’étais apiculteur amateur, le manège des frelons devant le trou de vol de mes ruches. Le frelon faisait du surplace devant la ruche et parvenait à attraper quelques abeilles en vol à la sortie de la ruche et à les tuer et dépecer comme on vient de voir. Je signale ce fait parce qu’aujourd’hui on considère que le frelon asiatique s’en prend à nos ruches mais la manoeuvre que j’ai observée à maintes reprises indique que notre frelon indigène pratique parfois de même.
Si l’on en croit la Hulotte, et sa façon amusante de dire le choses, le frelon est (relativement) inoffensif. Quand on ne l’embête pas, bien sûr.
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Effectivement le frelon est relativement inoffensif vu qu’il attaque bien moins qu’une guêpe par exemple. Bien entendu la prudence reste de mise en particulier en cas de présence d’un nid. Qui s’y frotte de trop près… Merci de votre vol sur mes lignes !
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Fin stratège ce frelon bien de chez nous. Et quand il est qualifié d’asiatique, il fait encore plus peur : toujours ces vieux réflexes, n’est-ce-pas. A ce propos, le budleia n’est-il as aussi une plante bien invasive venue d’ailleurs ? Bravo pour ces séquences photos et les histoires qui les accompagnent !
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L’envahisseur est et reste celui qui est différent. Cas du buddleia, comme vous le soulignez, espèce arbustive différente de nos espèces locales et importé à partir du milieu du XIXe siècle (Père David) et plus encore du début du XXe s. A une nette préférence pour les sols bien drainés et plutôt acides, dès lors il peut proliférer. Dans notre jardin installé sur la roche calcaire affleurante à un fer de bêche il est chez lui et a l’avantage d’attirer des dizaines de papillons, quand il en reste assez à proximité… Votre oeil à l’affut détecte également fort bien ce qui est parfois à peine caché mais non remarqué par certains.
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Piqûre douloureuse. L’enfant s’en souvient encore, la bête et son dard dans une pomme tombée et belle et malencontreusement saisie…
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Et oui, c’est souvent ainsi qu’une première piqûre survint. Un jour notre aîné a été piqué par un frelon qui avait passé l’hiver bien au chaud dans un gant de jardinage….mais on ne peut être en permanence en alerte !
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Les images de cet avion d’attaque et de la ruine sur la feuille de l’arbre à papillons,
du macro-magique!.
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La capacité d’observation est l’une des clés de l’enchantement du monde, si l’on veut ainsi nommer ou décrire ce qui n’a pas d’existence en soi. Les enfants, par le jeu et l’imaginaire en sont les praticiens ordinaires. Le plus souvent, prenant de l’âge on oublie cette approche du monde. Dommage. A moins de ‘retomber en enfance’ ou de pratiquer l’art de la futilité, au risque de passer pour un poète, un presque ‘bon à rien’.
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