Lumières d’orage

L’été est là et d’un coup sa lumière habituelle fait place à un étrange éclairage connu et craint tout à la fois. Dans le même temps de lourds nuages d’abord fixes se déplacent en tous sens et des tourbillons de vents tempétueux font ployer les arbres, onduler leurs rameaux et soulever de menus débris du sol.

Vous avez deviné l’approche de l’orage.

 

nuages d'avant l'orage
peu avant de lourds nuages emplissent le ciel et semblent conquérir l’horizon

       Puis l’affaire se précise. Les teintes vives s’estompent et font place à une lumière laiteuse qui enrobe tout. Les verts deviennent bleutés puis gris puis jaunâtres, suivant les lueurs dans le ciel tourmenté. Peu avant le paroxysme un jaune orangé terreux suinte de partout :

début d'orage

Sauve-qui-peut ! On est dedans, on attend. L'éclatement va se produire.

Alors tout peut arriver, la crainte est vive. De grosses gouttes explosent que la lenteur du déclenchement de l’appareil convertit en têtards :

des gouttes d'orage

attendues les gouttes d'orage laissent craindre néanmoins la grêle.

Puis la pluie omniprésente jaillit d’un horizon l’autre, dans tous les sens, portée par des vents en bourrasques imprévisibles.

pluie d'orage

à choisir entre 'bâche qui perce' ou 'vache qui pisse'

La période du romantisme d’abord a maintes fois privilégié cette forme d’intempérie pour la traduire en mots, en couleurs et sonorités : Chateaubriand, Hugo… Rousseau, Troyon et toute « l’école de Barbizon« , suivis d’autres, et Beethoven et cent autres depuis. Les cimbales et toutes variétés de caisses ont résonné dans tant de ‘symphonie fantastique’. En peinture le rendu technique de l’éclairage le plus proche qui me soit venu à l’esprit en observant le ciel devant ma vue est celui plaqué de main de maître sur un panneau peint à l’huile par Constant Troyon, appartenant aux collections du ‘Musée Pouchkine’de Moscou. Il date de 1851 et s’intitule justement ‘avant l’orage’. Splendide restitution, voyez ci-dessous :

scène d'avant orage brossée par Troyon

une exactitude des tons et de l'ambiance à couper le souffle (d'Eole ?)

Image subtilisée à Jean Bourete, L’école de Barbizon et le paysage français au XIX ème siècle, Ed. ‘Ides et calendes’, Neuchatel,1972, 272 p.

André Gide, dans ‘les nourritures terrestres’ (1897) décrit ainsi le phénomène météorologique et son ressenti :

« …Le ciel s’était chargé d’orage et toute la nature attendait. L’instant était d’une solennité trop oppressante, car tous les oiseaux s’étaient tus. Il monta de la terre un souffle si brûlant que l’on sentit tout défaillir ; le pollen des conifères sortit comme une fumée d’or des branches. Puis il plut. »

J’aime beaucoup également le synthétisme abrupt et signé de Jean Giono, ici à partir de ‘Jean le Bleu’ (1932) :

« …Les rossignols du lavoir chantaient encore. L’orage maintenant tenait tout le rond du ciel. »

Soleil et lumières d’été de retour roulent les dernières billes de glace, simple jeu naturel vécu comme tel quand, par chance, les éléments déchaînés n’ont pas causé de dégâts.

pour jouer

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