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Marcel Proust, Mme Williams sa voisine et Reims.

On a oublié que Marcel Proust qui aimait tant se coucher de bonne heure fut aussi un voisin délicat. Mais comment le savoir si ce n’est écrit quelque part et comment aurait-on deviné que cet auteur renommé ait pu écrire à une voisine du troisième étage lorsqu’il résidait 102 boulevard Haussmann à Paris ? La découverte récente de quelques lettres retrouvées et publiées chez Gallimard et disponibles à notre lecture et plaisir ce jour, comble cette lacune et pour nous Rémois nous dit l’attachement de Proust envers notre cité.

références sur la première de couverture et ISBN = 978-2-07-014224-8
septembre 2013, 86 p.

L’intérêt autre que littéraire, est que Marcel Proust donne dans une de ces lettres datable de Noël 1914 son point de vue sur la récente destruction partielle de la cathédrale suite à l’incendie provoqué par un bombardement allemand en date du 19 septembre 1914.

L’affaire a fait grand bruit et Reims devient alors le symbole de la barbarie germanique. Au reste, astucieusement, Proust assure que « le désastre de Reims, mille fois plus funeste à l’humanité que celui de Louvain – et à l’Allemagne d’abord, dont Reims à cause de Bamberg était la cathédrale préférée – n’est-il pas un crime aussi froidement conçu. »

De fait l’incendie de Reims est relaté partout dans la presse et différents supports écrits, figuré et photographié, pendant et après l’incendie. Marcel Proust analyse ensuite ce qui lui fait apprécier Reims, comparativement à Amiens, Chartres ou Paris. Il évoque également des séjours à Reims qui : « …tant que ma santé me le permet fais aux pierres de Reims des pèlerinages aussi pieusement émerveillés qu’aux pierres de Venise… »

J »aimerais trouver la trace de ces pèlerinages ! Non spécialiste de littérature ma mémoire n’a pas retenu de telles citations chez cet auteur et un rapide parcours de mes notes, une brève excursion chez des amis plus au fait ne m’apporte rien non plus. Attendons la sagacité de quelque érudit concitoyen pour expertiser l’anecdote.

Evoquant ‘le sourire de Reims‘ Proust est dans la mouvance de ce qui s’écrit en son temps ou peu avant (Emile Mâle puis André Michel en particulier) sur cette superbe cathédrale. Peut-être a-t-il lu également dans ‘Le Matin‘ en date du 21 septembre 1914 le bel article d’Albert Londres : « ils ont bombardé Reims et nous avons vu cela ! »  où l’auteur établit également des comparaisons avec les cathédrales de Chartres et Paris ? Ce n’est qu’à cause de l’incendie et du bombardement volontaire que ce sourire va devenir à jamais ‘l’Ange au sourire‘. Cela dès 1915 à la suite d’un article du New-York Times relatant l’achat d’une tête d’ange de Reims par un riche industriel américain. Non fondée l’assertion déclenche des recherches à Reims et l’architecte Max Sainsaulieu retrouve la plus grande partie de la tête qui avait été mise à l’abri sitôt l’incendie par l’abbé Thinot. Cet ange, celui de Saint-Nicaise, la tête lui tourne et tourne désormais de par le monde, parfois en voisine  de nos non moins célèbres bulles. On ne choisit pas ses voisins.

 pastel réalisé par mes soins en 1996 avant que ne se soient répandues les reconstitutions virtuelles colorées sur les monuments. Ci-dessous l’ange au sourire projeté sur la façade de la cathédrale lors de l’une de ces soirées-spectacles par ailleurs évocatrices de certaines formes du passé, même si le contenu ‘scientifique’ est laissé de côté.

l’‘Ange au sourire’ tel qu’il sourit en 2013 sur le portail latéral nord de la façade de la cathédrale Notre-Dame de Reims

Alors, amis lecteurs, si vous trouvez chez Proust une allusion à ses ‘pèlerinages de Reims’ racontés autrement qu’à sa charmante voisine, Marie Williams, je vous serais reconnaissant de me le faire savoir.

-pour en savoir plus sur « l’Ange au sourire » vous pourrez lire nos bons auteurs historiens rémois aux références multiples sur le web, parmi lesquels MM. Patrick Demouy et Yann Harlaut.

-pour fréquenter la compagnie des principaux auteurs qui ont écrit sur ou autour de Reims la lecture de : Dominique Hoizey, Reims entre les lignes, Messene, 1995, 93 p. sera une excellente approche. On complètera utilement par un article récent du même Dominique Hoizey, précis dans sa documentation autant que par son écriture,  sur son blog :  http://lechatmurr.eklablog.com/recent .                                                                                         Il y expose une correspondance peu connue entre Romain Rolland, Stephan Zweig et Emile Verhaeren au sujet de la cathédrale de Reims. A lire absolument, y compris par des historiens.