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Mudo : de son éclectisme goûter les saveurs

Logé comme un prince d’Eglise en un écrin qui hésite entre Renaissance et gothique, inspiré par un préfet éclairé, et dernièrement revisité avec talent, le Musée départemental de l’Oise (Mudo) vient de (ré)ouvrir avec le soutien du Conseil général de l’Oise et divers concours. En 1305 l’évêque de la cité avait eu à affronter l’ire des bourgeois, à se protéger parmi les vestiges des remparts gallo-romains derrière une porte fortifiée. L’un de ses successeurs, Louis Villiers de l’Isle Adam, deux siècles plus tard fit élever ce palais qui protège aujourd’hui les collections que vous pouvez fréquenter gratuitement, sauf le mardi. Profitez-en sans modération.

rempart gallo-romain de Beauvais

vestiges du rempart gallo-romain, consolidé ou reconstruit récemment

Protégé par une porte fortifiée édifiée au début du XIV e siècle, tout près de la cathédrale et de l'église antérieure visible ici à droite

Protégé par une porte fortifiée édifiée au début du XIV e siècle, tout près de la cathédrale et de l’église antérieure visible ici à droite

façade du palais épiscopal qui fut aussi palais de justice

façade du palais épiscopal qui fut aussi palais de justice

LanternonPalaisWle lanternon protège trois cloches dont l’une de 1508

Les collections de peinture, essentiellement du XIXe siècle, ainsi que d’autres expressions artistiques, se répartissent dans un espace lumineux centré sur une salle dédiée au peintre senlisien Thomas Couture. Sa grande oeuvre (9 m. x 5 m.) : l’Enrôlement des Volontaires de 1792, rayonne sur l’un des murs entourée de quelques toiles préparatoires de bel effet. On la scrute sur deux niveaux, en toute visibilité. Les deux photographies suivantes en présentent une vue partielle (partie supérieure) et l’une des études.

CoutureVendGPpartieSuperieureW enrôlement des volontaires de 1792Dans les autres salles chacun composera son menu comme il est naturel de faire lorsque les étals sont garnis d’abondance dans la diversité. Aucune règle autre que l’attirance personnelle, avec parfois une incitation des conservateurs à comparer, avec raison, un même endroit vu par deux peintres ou bien encore un même lieu à des moments séparés dans le temps et décrits par des personnalités que rien ne rapproche a priori. Ainsi ai-je retenu les ruines du château de Pierrefonds par Jean-Baptiste Corot presque débutant et sa reconstruction par Viollet-le-Duc selon Emmanuel Lansyer,

CorotRuinesPierrfdsWPierrefonds par Lansyerou bien encore la célèbre vasque romaine de la Villa Médicis par Corot toujours puis par Maurice Denis. Vous composerez à votre guise, apprécierez selon vos penchants et goûts.

   Corot, Vasque de la Villa MedicisWMaurice Denis, Vasque de la Villa MédicisRien n’est véritablement à comparer dès lors que l’éclectisme propre au XIXe siècle ne suggère en rien des rapprochements ou des oppositions systématiques. Pourquoi ne pas apprécier dans un même élan de sympathie la douce caresse d’ Albert-Ernest Carrier-Belleuse (sculpteur et peintre originaire d’Anizy-le-Château (1824) dans le marbre ou la sensualité très politique du peintre vendéen Merry-Joseph Blondel qui nous propose une synthèse des trois journées de juillet 1830, les Trois Glorieuses, que n’auraient sans doute pas dénigrée les trois cavaliers enfants de roi sans pour autant le faire savoir aux adeptes de la monarchie. Quant aux républicains ils touchent là de la vue l’objet de leurs supposés fantasmes :

Carrier-Belleuse, buste de femme au rosier, 1858

Carrier-Belleuse, buste de femme au rosier, 1858

Trois Glorieuses, Blondel, 1830Vous l’avez compris je pourrais vagabonder en votre compagnie sous les auspices de l’art, sans raison, sans but mais pas sans rêves. Là est l’essentiel. Sans doute est-ce pour cela aussi que la modernité dans ses installations surprenantes, pour reléguée qu’elle soit dans le grenier, n’en est pas moins stupéfiante, aimable et émouvante dans la surprise qu’elle engendre. Voyez plutôt, je vous tiendrai modérément informés ensuite :

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Deux vues captées de "Axis Mundi" par Charles Sanderson

Deux vues captées de « Axis Mundi » par Charles Sanderson

De quoi s’agit-il ici ? De mots projetés, mots sélectionnés par l’auteur Charles Sanderson, Finlandais, sur la charpente du XVIe siècle du ‘Mudo’. La surface de ce grenier est d’environ 500 m2 et sa hauteur = 14 m. Effet de surprise garanti. On y est on rêve, on sort : rêveries en tête. Heureusement les images ne touchent pas tant que la réelle présence de ce lieu ponctué de lettres.

Ce beaucoup est-il tout ? Pour cette note de blog un  peu longue, presque. Je réserve toutefois pour la sortie (mais en laissant pour votre soif un « espace boutique » qui présente aussi de séduisants vestiges de bois sculptés) une salle gothique de la porte d’entrée bâtie autour de 1305 et décorée de même. Dans un angle un curieux combattant gaulois du premier siècle vous dévisage, à moins que ce ne soit vous qui ne soyez scotché par son fixe regard. Il nous vient de près, Saint-Maur-en-Chaussée, et n’a daigné sortir de terre qu’en 1984, pour notre étonnement encore :

premier siècle de notre ère, mais au fond, sans âge, là est le mystère de l'art...

Quand, soudain, du voûtain, au-dessus de ma tête, tombèrent des sons de flûte, de viole, de cornemuse, de trompette marine, de tambourin. J’ai levé les yeux et vis les musiciennes, charmantes, charmeuses même et aussitôt j’ai aimé leurs écailles, leurs nageoires, leurs queues. Plusieurs se sont dérobées au photographe, pas les cinq. Voici l’une d’elle, ainsi s’offre-t-elle à vous comme à moi :

sirèneElles ont été peintes à fresque peu après l’édification de la porte, donc au tout début du XIVe siècle et ont été restaurées tout récemment.


En savoir plus : http://mudo.oise.fr

Mudo, Musée de l’Oise, 1 rue du Musée, 60000 Beauvais. 03 44 10 40 50

Pierrefonds, Caroline et ses Jules, Séverine et son Jules.

Curieux titre pour une bien étrange femme. Oubliée aujourd’hui ou seulement connue des spécialistes du mouvement social ou de l’émancipation des femmes, Caroline Rémy, née à Paris le 27 avril 1855 est parvenue par le hasard des rencontres et sa force de caractère à sortir de son milieu et à épouser diverses causes, sinon plusieurs hommes. Pierrefonds fait partie d’un temps de sa vie ; sa tombe et celle d’Adrien Guebhard apportent dans le cimetière du village une note art-déco de massive fantaisie et de force tout en invitant au questionnement.

« Séverine » = Caroline Rémy, gravure de l’album Mariani

L’album Mariani met en avant des personnalités de tous bords qui ont accepté de promouvoir l’élixir Mariani créé en 1863 par Angelo Mariani. Il contenait du vin de Bordeaux et des extraits de coca.

Fille d’un petit fonctionnaire à la Préfecture de police de Paris, née à Paris en 1855, mariée contrainte en1872 à Antoine-Henri Montrobert, homme violent qui la bat, elle s’en sépare vite bien que mère d’un petit Louis. Elle devient bientôt l’amante d’un jeune bourgeois professeur de médecine, licencié en mathématiques et en physique, Adrien Guebhard dont la famille, amie de son oncle Vuillaume, l’emploie. Elle a avec lui un fils, Roland, né à Bruxelles car la famille Guebhard rejette cette union non conforme à la normalité en cours. Lors de  son séjour wallon elle rencontre en 1879 ou début 1880 à Bruxelles celui qui va donner à sa vie une orientation politique marquée, Jules Vallès. Elle devient sa secrétaire, sa confidente et une collaboratrice de premier plan. Elle a 25 ans, lui 48 ans. Lorsque ce dernier relance en 1883 « le Cri du peuple » elle lui en procure le financement par Adrien Guebhard et en dirige avec lui les feuilles. A la mort de Vallès en 1885 elle prend la direction de ce célèbre quotidien socialiste. La même année, le divorce étant rétabli, elle épouse Adrien. En 1888 à la suite d’une opposition vive avec Jules Guesde, marxiste, elle doit quitter le journal et écrit alors quantité d’articles dans diverses revues à caractère politico-sociales. Dans ce contexte elle tombe amoureuse du journaliste Georges de Labruyère, vit avec lui jusque sa mort en 1920, année au cours de laquelle elle reprend vie commune avec Adrien Guebhard jusque la mort de ce dernier en 1924. Elle a des choix d’amitiés qui aujourd’hui surprennent, comme par exemple lorsqu’elle soutient un moment le général Boulanger ou même, rarement, des idées antisémites alors qu’elle est dreyfusarde. Féministe remarquée elle combat également pour la défense des petits et des faibles contre les puissants, en politique ou par la richesse. Ainsi se bat-elle en 1927 pour Sacco et Vanzetti et prend-elle la cause du pacifisme après la loi sur ‘l’organisation générale de la Nation sur le temps de guerre’, rejoignant alors de célèbres personnalités militantes de ce mouvement dont Alain et Jules Romains notamment.

Si vous doutez encore de la force de ce tempérament hors du commun lisez ces lignes qu’elle adresse, parmi quantité d’autres, à JulesVallès, celles-ci du 17 juillet 1883 :

« …Etoilé d’idées pour vous, étoilé de horions pour les autres ! Vivant en somnambule, vous parlez en somnambule, par interjections, par tiers de mot, par quart de syllabe. Vous croyez être très clair et vos phrase s’achèvent en dedans : vous pensez vos paroles, et elles ne sortent pas. Il en résulte pour ceux qui vous entourent une existence de clowns. … …Seulement je voudrais que vous vous rendiez compte de l’inconséquence, de la brièveté, du décousu et souvent même de l’illogisme des instructions ou des ordres que vous jetez à vos féales. » extrait de : Jules Vallès-Séverine, Correspondance, préface et notes de Lucien Scheler, EFR, 1972, p. 98-99

Et Pierrefonds dans tout cela ?

Figurent à l’état-civil de Pierrefonds des Rémy dont je n’aie pu vérifier l’éventuel lien de parenté avec notre Caroline ‘Séverine’. Toujours est-il qu’en 1896 elle quitte Paris pour s’installer dans cette paisible bourgade alors dans l’effervescence des bains et d’une certaine mode du thermalisme lancée en partie par l’impératrice et Napoléon III une trentaine d’années auparavant. Elle y loue des maisons puis en achète une, en face de la gare, qu’elle nomme « les trois marches ». Elle l’agrandit en réhaussant les ailes basses latérales, y reçoit ses nombreux amis et apprécie la compagnie de nombreux chiens.

villa 'Séverine' à Pierrefonds

La ‘villa Séverine’ en 2013 à Pierrefonds, face à la gare.

Outre cette villa, propriété privée qui ne se visite pas, demeurent encore à Pierrefonds dans le cimetière communal, la tombe d’Adrien Guebhard et, face à elle, légèrement décalée, celle de Séverine. La photographie suivante montre ces deux tombes, celle de Séverine étant contre le mur d’enceinte au nord-est du cimetière.

les deux tombes Guebhard, celle d’Adrien gris bleuté, celle de Séverine, ocre rosé

Sur la tombe de son mari Séverine a fait graver : « Il a vécu comme un sage et il est mort comme un juste »

monument funéraire de Caroline Rémy, dite Séverine, à Pierrefonds

J’ai toujours Lutté pour la Paix la Justice et la Fraternité

A côté de la tombe de son mari, à gauche vers l’ouest gît également Rosa Vignier, 1884-1932, dame de compagnie, fidèle compagne sans doute des époux Guebhard

« Rosa Vignier, 1884-1932, elle consacra sa vie à Séverine qui l’affectionnait et qui mourut dans ses bras »

Il me plaît de temps à autre de rechercher des lambeaux d’histoires humaines, des traces de l’Histoire, des fragments d’Art. Un jour peut-être mettrai-je ici ou là, aux pieds des tombes, des « Query codes » qui permettront aux promeneurs de s’informer sur tel ou tel parcours original, humaniste ou simplement attrayant ? Un jour peut-être car alors il y aura tant à écrire sur la toile que j’y laisserais ma vie. Mais d’ici là les Query codes ne seront sans doute plus de mode….

 

Pierrefonds d’or et de cuivre, de la dote à l’anecdote.

Qui ne connaît sa silhouette ‘troubadour’ encore debout grâce à Napoléon III et Viollet-le-Duc se détachant du plateau valoisien, son antique forêt parcourue des rois et des chasses sonnantes, ses étangs paisibles et la bourgade des Pétrifontains aux villas composites et aux maisons de pierre égayées de sauts de moineaux ?

ruines du château de Pierrefonds vers 1830

lithographie des ruines du château par Bernard et Frey dans : Notice historique sur Compiègne et Pierrefonds, Baillet, Compiègne, 1836, 84 p.

L’oubli s’est installé des riches heures des princes, des éclats d’eau dans les thermes promus à nouveau par le goût des eaux développé sous le Second Empire. Désormais il faut rechercher l’or d’antan dans des recoins discrets, les cuivres naguère polis dans des remises abandonnées.

Ainsi serez-vous sensibles aux charmes surannés des vierges peintes sur les magnifiques panneaux des trois ‘primitifs‘ conservés bien à l’abri dans l’église Saint-Sulpice, dans leur dorure éclatante, leur écrin sculpté dont l’or avive les arêtes derrière les ferrures et vitres blindées qui les protègent. Nul doute que l’école siennoise (?) survit ici, probablement à la suite d’une commande des Orléans, Louis, époux de Valentine Galeas Visconti qui dans sa dote… (?), pense et échafaude d’emblée l’historien *. Où entrent-ils dans la mouvance artistique de la papauté d’Avignon ? Mal documentés ils restent pour l’instant presque muets quant à leur origine et parcours mais bavards d’intentions sensibles aux yeux des touristes avertis qui entrent dans cette église où globalement le Moyen-Age laisse place à la Renaissance, le roman au gothique flamboyant.

La vierge à l’enfant tenant un oiseau a ici une parenté certaine d’inspiration et d’exécution avec un diptyque de la Pinacothèque nationale de Sienne attribué à Naddo Ceccarelli, peintre qui travaille en Avignon à la suite de Simone Martini, donc aux alentours du milieu du XIVe siècle.

Nullement spécialiste d’histoire de l’art je n’écris ceci qu’après avoir comparé ce tableau avec un nombre fort limité de reproductions d’oeuvres de cette époque. Le saint en bas à gauche pourrait être saint Jérôme, souvent présent sur les peintures contemporaines siennoises. A son pied rampe le lion auquel il a retiré l’épine qui lui meurtrissasit la patte. A droite, avec l’épée pointée au sol il pourrait s’agir de saint (?). M. Andrea de Marchi, professeur d’histoire de l’art à l’université d’Udine et donc spécialiste reconnu, évoque saint Julien pour ce porteur d’épée et attribue le tableau au « maestro del 1416 » oeuvrant à Sienne au XIVe siècle.  (source : base Palissy, qui renvoie à INHA RETIF 2011).

sur ce panneau la posture de l’enfant et le visage de Marie renvoient vers le peintre Paolo Di Giovanni Fei (Sienne, v. 1344 -1411) dont un diptyque de Sienne conservé au même lieu présente une attitude des personnages très proche. Il est attribué à la fin du XIVe siècle.

La prédelle montre neuf personnages, sans doute des apôtres, je n’ai pu la photographier. La même source que ci-dessus fait référence à l’artiste Giovanni di Francesco, de l’école florentine, v. 1370-1430. Elle porte l’inscription : « in gremio Matris residet sapientia Patris », soit : ‘dans le giron de la Mère siège la sagesse du Père’.

la position de l’enfant et les longues mains de la Vierge peuvent ici évoquer le style de Francesco di Vannuccio, toujours dans la mouvance de S. Martini et le milieu du XIVe siècle.

Plus ‘gothique international’ que les deux autres cette peinture me semble présenter moins de proximité apparente avec Sienne, mais la Toscane ne paraît pas faire de doute. M. de Marchi l’attribue volontiers au ‘maestro dell’ altare di san Niccolo’, école florentine du milieu du XIVe siècle.

La qualité très médiocre de mes clichés dénature quelque peu celle des panneaux peints et je vous demande pardon pour cette faute de goût. Je comprends par ailleurs la nécessité d’une protection forte qui n’empêche ni la vision directe par le visiteur ni ses prières que peuvent susciter la délicatesse des traits et des teintes, en souvenir d’une imagerie paradisiaque médiévale réanimée derrière l’objectif. De meilleurs clichés seraient nécessaires pour tenter d’aller plus avant dans l’étude stylistique. Toujours est-il que je vous recommande de visiter cette église et ses panneaux peints lors d’un passage à Pierrefonds : ils ont de plus le mérite d’être quasiment contemporains de la construction du nouveau château voulu par Louis d’Orléans et donnent ainsi à voir ce que les princes aimaient alors posséder derrière leurs murs de plus en plus résidentiels et ouverts au monde. S’ils n’ont été commandités par lui, du moins sont-ils à leur place ici.

Voilà pour l’or. Quant au cuivre il m’est tout personnel, n’a plus d’éclat mais reprend vie dans l’évocation de souvenirs mémorisés depuis le grenier de la maison de la rue ‘des chiens rouges‘, aujourd’hui de l’impératrice Eugénie, qui fut nôtre et donc mienne en partie jusqu’au dernier quart du siècle précédent. De quoi s’agit-il ? Pour continuer sur les pas des grands du monde,  » et bien je vais vous le dire » : d’une casserole, rien moins que cela. L’un de ces récipients à cuire, de cuivre épais (2,30 mm) qui fut étamé, d’un diamètre de 19 cm, d’un poids de 1,310 kg et que l’on agrippait par un manche de fer long de 24 cm solidement riveté de cuivre au récipient. Rien que du banal dans sa robustesse.

Qu’ai-je à traîner des gamelles, des casseroles de cette sorte ? J’entraîne en fait avec elle des propos rapportés par ma grand-mère, Sophie Dennel-Fayard, dite Mariette, qui habita ladite maison des ‘Chiens rouges’, semble-t-il construite par des ancêtres qui oeuvraient à la restauration du château devenu impérial ; les Fayard exploitaient un équarrissage et géraient différents petits commerces familiaux dans une autre maison un peu plus récente dénommée ‘la carrière‘, à l’écart du bourg, en partie sur le finage de la commune voisine de Saint-Etienne-Roilaye. Et cette casserole est en fait un don de l’impératrice Eugénie à des personnes qui la servaient lors de ses très rares séjours à Pierrefonds et Compiègne. Ma grand-mère se souvenait également, pour l’avoir entendu de ses parents, que la Cour impériale était venue au moins une fois à Pierrefonds depuis Compiègne en un cortège de traîneaux attelés lors d’un épisode froid et neigeux. Les mystères du fonctionnement cérébral font que j’ai parfaitement mémorisé ces faits, les ayant enregistrés avec des images mouvantes et imprécises mais comme issues d’une réalité presque vécue. Etrange ustensile, pensées lointaines d’un Second Empire ayant brutalement sombré dans les terres ardennaises. Les caricaturistes de l’époque ne se sont pas privés de jouer avec la défaite de Sedan. Voyez plutôt.

Ainsi, toujours dans le cuivre, trouve-t-on des monnaies surchargées ou regravées ou bien encore des jetons et médailles frappées pour la cause, suivant l’imitation des pièces de 5 et 10 centimes de l’Empire français de Napoléon III. Avant la guerre de 1914 ces pièces de monnaie impériales étaient toujours utilisées à Pierrefonds (selon la même source orale), et l’on parlait alors de ‘20 sous‘ ou ‘100 sous‘, suivant une expression commune que j’entendais encore à la fin des années Cinquante pour désigner des pièces d’aluminium de 5 et 10 francs, dernière trace de la manière de compter ancienne : 12 deniers = 1 sou ; 20 sous = 1 livre.

L’empereur est affublé d’un collier de chien inscrit « Sedan » et porte un casque à pointe. La légende est : « Napoléon III le misérable » et « 80000 prisonniers« .

« 

Ici l’aigle impérial est remplacé par une chouette effraie et la légende porte : « Vampire français » et 2 déc(embre) 1851 – 2 sept(embre) 1870.

Pour en savoir plus sur les travaux de l’Ecole de Sienne en lien avec Avignon et Simone Martini le lecteur pourra se reporter au catalogue : « l’Héritage artistique de Simone Martini, Avignon-Sienne« , éditions Petit Palais diffusion, 2009, 111 p.

* toutefois le parcours de ces panneaux n’étant pas assuré, peut-être n’ont-ils pas de rapport direct avec le château et ses seigneurs. Selon une source que je n’aie pu vérifier ils pourraient être le don d’une famille de Palesne, hameau de Pierrefonds. Faute de preuves…

Quant aux jetons et médailles de caricature d’époque Napoléon III on trouve de nombreux exemplaires chez les numismates professionnels.

Hommage aux infirmières de la Première Guerre Mondiale : Reims, Pierrefonds et dans les coeurs.

La lecture du titre laisse entendre que Reims et Pierrefonds ont quelque chose à montrer, en dehors de l’attachement tout à fait justifié à la cause du dévouement des infirmières lors des conflits et spécialement lors de la guerre de 14-18.

En effet ces deux villes à caractère historique sont, au moins selon les sources dont je dispose, les seules à avoir ériger un monument consacré à la cause des infirmières.

      Celui de Reims est installé Place Aristide Briand, ex Square de l’esplanade Cérès comme on disait avant 1932 et fut inauguré le 11 novembre 1924. Les photographies ci-dessous vous en offrent des vues assez précises. Un ajout y fut placé pour honorer la mémoire d’infirmières et brancardiers tués à proximité lors d’un bombardement allié sur la ville le 30 mai 1944. Ce blog présente des notes courtes et si vous souhaitez connaître dans le détail l’histoire de ce monument rendez-vous ici :

http://www.crdp-reims.fr/memoire/lieux/1GM_CA/monuments/reims_infirmieres.htm

monument aux infirmières à Reims place Aristide Briand

le monument de la Place Aristide Briand à Reims

 Outre ce monument la Ville de Reims conserve un Livre d’Or des Infirmières où sont recensées toutes les infirmières tuées dans leur service, en France et dans le monde lors de la Grande Guerre.

L’autre monument destiné à prolonger la mémoire du sacrifice des infirmières est celui qui fut érigé à Pierrefonds après la guerre, dans le même but que celui de Reims, avec une mention spéciale pour Elisabeth Jalaguier, infirmière de l’hôpital n°226 tuée en ce lieu le 20 août 1918 lors d’un bombardement. Inauguré après restauration en 1955 il intègre à sa base une statue en bronze de Real del Sarte dont le plâtre original est conservé dans l’église Saint-Sulpice de Pierrefonds.  Là encore vous aurez plus de renseignements sur ce monument dans le site mentionné ci-dessus, ainsi que sur celui fort connu des passionnés de 14-18 nommé ‘les découvertes du chamois’ auquel j’emprunte la photographie jointe ci-dessous, en voici la référence :

http://chamois.canalblog.com/archives/2008/01/30/7760497.html

Monument aux infirmières de Pierrefonds

Monument aux Infirmières, square de l'Hôtel des Bains à Pierrefonds, photographie "le Chamois"

Voilà pour les deux monuments français. En ce qui concerne les coeurs ce n’est pas cette note qui va épuiser ni le sujet ni la reconnaissance des soldats et de leur famille. Observons seulement quelques photographies souvenirs.

Bien entendu des infirmières ont tenu parfois des carnets ou des albums avec photographies. De l’un de ceux-ci je vous propose ces trois infirmières suisses dont je ne connais pas les noms et qui figurent dans l’un de ces recueils de souvenirs émouvants

trois infirmières suisses en repos lors d'une excursion

trois infirmières suisses en repos lors d'une excursion

autres photographies du même album

éclats d'obus enlevés dans la peau de blessés

assez étonnants ces éclats d'obus extraits du corps des blessés et cousus sur carte !

Eclats d’obus recueillis à l’infirmerie de la Gare Saint-Jean de Bordeaux et expédiés par le service. Je ne dispose pas d’autres renseignements liés à cette pratique.

image très connue d'un brassard d'infirmière

brassard officiel avec tampons d'affectation

Il arrivait fréquemment que des soldats rédigent des lettres de reconnaissance à leurs infirmières préférées, leur offrent des cadeaux. Quelques soldats ont épousé leur infirmière, rien d’étonnant au fait. Plus étonnant est un ensemble de témoignages annotés par 78 soldats et inscrits dans un carnet spécialement rédigé pour la circonstance. Certains ont accompagné leur texte ou poème d’un dessin, d’une aquarelle ou gouache, ce que permettait de faire ce registre qui alterne page pour écrire et page pour dessiner. Je place ici l’un des textes et l’une des illustrations extraits de ce recueil rédigé à l’hôpital auxiliaire n° 110 de Caluire, pensionnat de l’Oratoire, à l’attention de mademoiselle Paule Cordet en 1915.

remerciements du soldat Marius Bruchon à son infirmière

poème et peinture en reconnaissance de soins

poème en anglais et peinture du soldat Maurice Ducot à son infirmière

Il faut bien clore et je le fais en citant une nouvelle fois Vailly-sur-Aisne et deux infirmières du lieu honorées spécialement pour leur conduite exemplaire :

Mademoiselle Adèle-Olympe Crochard (en religion soeur Sainte-Geneviève) a reçu la Croix de Guerre et la Médaille de la Reconnaissance Française ainsi que la ‘British Red Cross War Medals‘.

Il en fut de même pour mademoiselle Anna Heinrich, aide de Mlle Crochard, qui reçut la Croix de Guerre, la ‘British REd Cross‘ et fut élevée au rang de chevalier de la Légion d’Honneur.

Ce onze novembre 2011 est l’occasion de rappeler l’immense dévouement de ces femmes dans la guerre. Ne les oublions pas !