Archives pour la catégorie carnet personnel

Ronde épistolaire du 15 novembre 2017

En ce mois de novembre j’ai le grand plaisir d’accueillir les propos de Noël Bernard « le Talipo », dans le contexte d’une ronde amicale devenue tradition. Le thème en est : lettre(s). Elle tourne dans le sens suivant déterminé par tirage au sort sous la vigilance habituelle de Dominique. Cette ronde tourne ainsi ce mois :

chez…
Marie-Noëlle Bertrand http://ladilettante1965.blogspot.fr/
Dominique Autrou https://dom-a.blogspot.fr/
Jean-Pierre Boureux http://voirdit.blog.lemonde.fr/
chez DH, etc.

 

L’e

Le cercle déferlé de cette lettre belle
Semé, perle de sel, en mes lemmes légers,
Etend l’extrême mètre en mes versets femelles,
En desserre le temps, tel le vent des vergers.

En cette frette, emblème en grecque répété,
J’entends le bercement des gréements, des échelles,
L’enflement des vents d’est, des sternes les crécelles
Et, de jetées en nefs, les fêtes de l’été.

Mes lèvres, tel l’évent de ce cerne éthéré,
Versent l’èbe dément des sentences rebelles.
D’encre, célère penne, en ce scel excentré,
Mets en germe le rêve et les mers éternelles.

 

« La grande vague de Kanagawa », par Hokusai. Source : Wikimedia

Exaucée ! Tournus, 8 juin 2017

Le bandeau autoroutier se déploie sans cesse tel un mirliton et lasse mon regard, Tournus est fléché, j’y retrouverais volontiers les volumes novateurs de l’architecture de Saint-Philibert, dans son choeur, sa galilée, sa crypte, clignotons en sortie !

Novatrice parce que la première identifiée, la circulation dans le déambulatoire, bien qu’encore incomplète est plaisante. La salle principale de la crypte sous-jacente favorable à la méditation élève la vue au long de ses fines colonnes ornées de chapiteaux très frais.

Connue des spécialistes de l’art roman l’architecture du sanctuaire plaît tout autant au curieux qui se sent bien là. Et la chapelle supérieure de l’avant-nef (ou galilée) surprend par l’audace de l’architecte pour ce début du XIe siècle.

Quant à moi je viens également pour l’aigle du lutrin de l’ambon, signé par l’orfèvre Goudji que je retrouve chaque fois avec la même émotion esthétique, de l’art intemporel. J’apprécie également le style des rares mosaïques du déambulatoire, dont ce chasseur à l’oiseau si représentatif d’une partie de la vie seigneuriale médiévale et qui, peut-être, se perchera tantôt sur ce lutrin .

Quant à la vision par la face sud-est elle offre depuis le cloître un aperçu de l’élégante massivité des structures romanes encore de petit ou moyen appareil et que des lésènes animent par leur jeu d’ombres et de lumières raffinés.

En ville les traces du moyen-âge apparaissent dans l’architecture civile où l’on observe ici et là quelques vestiges faciles à lire, par exemple l’emplacement à peine modifié des étaux de marchands dans les rues du bourg proche de la Madeleine :

Ne serait-ce que pour tout cela j’aime à revisiter Tournus. Ce n’est pas tout : le musée  Greuze et de l’Hôtel-Dieu, lové lui dans une architecture Grand Siècle fonctionnelle et de taille humaine a lui encore de quoi vous séduire. Il raconte les efforts des hommes et femmes de ce temps pour soulager les misères humaines, de par son hôpital, façon « hospices de Beaune » en plus modeste et les attributs qui le caractérisent. L’étain et le bois ont ici quelque chose de réconfortant ou rassurant, sous le regard de Dieu en sa chapelle. Le Musée « Greuze » en ses murs présente bien entendu quelques oeuvres de ce peintre très réputé en son temps ainsi qu’un ensemble archéologique, panorama régional des civilisations préhistoriques, gallo-romaines et mérovingiennes pour l’essentiel. J’en retiens un bien curieux coffret d’ophtalmologiste pour le traitement de la cataracte (vous n’en croirez pas vos yeux !) ainsi qu’une casserole au fond très étudié et fort ‘design’.

trousse d’ophtalmologie

Et même, et encore, et en plus, j’oubliais presque le titre de l’article : « exaucée ». Mais bien sûr, c’est cela qu’elle souhaite cette ingénue, qu’on vienne la voir, la surprendre en son désir le plus profond. Et bien oui, elle est exaucée, nous sommes devant elle, dans sa rêverie et son imploration.

Nommée « la Prière » une toile très connue de Jean-Baptiste Greuze est exposée au musée Fabre de Montpellier. Ici  nous sommes en présence d’une copie exécutée par une élève talentueuse et jusque-là inconnue de Jean-Baptiste Greuze, récemment offerte au musée par un descendant de la famille de la copiste. Je suis certain qu’un jour ou l’autre, vous aussi allez quitter l’autoroute pour venir la surprendre en ses songes qui seront dès lors les vôtres, car l’art s’approprie pour vivre mille vies. Voyez plutôt, ou mieux, venez voir plus tard !

D’autres surprises vous attendent en ce musée, dont une exposition temporaire de bonne facture consacrée au peintre tournusien Paul Perreaut et bien entendu des oeuvres de Greuze et des sculptures du XIXe siècle, au sujet desquelles vous serez peut-être attentif comme paraît l’être le visage inquiet de la femme de cette sanguine de l’artiste, qui semble désapprouver quelque chose. Serait-ce le désir ardent d’un faune ?

gros plan sur un plâtre (1893)de Bénédict Rougelet (1834-1894) intitulé : « Faune et faunesse »

Pour en savoir plus : http://www.musee-greuze.fr/expositions-en-cours

N’hésitez pas à poser des questions au personnel du musée, attentif aux demandes des visiteurs.

Ronde épistolaire du 15 juin 2017

En ce mois de juin j’ai la satisfaction d’accueillir les propos de Jacques dans le contexte d’une ronde amicale devenue tradition. Le thème en est : Parfum(s). Elle tourne dans le sens suivant déterminé par tirage au sort sous la vigilance habituelle de Dominique :

Guy (Emaux et gemmes des mots que j’aime ) / chez  Noël (talipo) / chez Dominique A.  (la distance au personnage) / chez  Élise (Même si) / chez  Dominique H. (Métronomiques) / chez  Giovanni  (Le portrait inconscient)  / chez Hélène (simultanées)  / chez   Jacques ( jfrisch)  / chez  Jean-Pierre (Voir et le dire, mais comment ?)  chez  Franck (à l’envi)  / chez Marie-Christine (Promenades en Ailleurs) / chez Guy …

Mon texte est publié chez Franck (à l’envi) que je remercie.

IXELLES

Comme le mot tombe
Sur la terre
Le bruit des étoiles est
Leur signature dans
Le ruissellement du ciel

Sur la tranche de l’arbre
Le temps trace des cercles
Ainsi le bois qui dure
Et le temps qui passe
Dansent
Se rencontrent

Je rentre, je m’arrête dans le soir à l’écoute d’un chant
De merle 
Et le mauve ne
Touche pas l’instant

Hésitation de la pie
Sur les feuilles mortes
Cette décoration d’un instant
Me comble

Un moment
Je ne crois plus à la mort
Je chante, je respire

Parfums offerts
Dans la brocante du monde
Je tremble au milieu de vous dans Bruxelles

Merci à tous les participants et organisateurs de cette ronde.

Cent ans, dix ans : in memoriam Pierre-Gilles De Gennes

Le 18 mai 2007 Pierre-Gilles De Gennes nous quittait, il manque à ceux qui l’ont aimé. Sa présence à la science et la technologie demeure partiellement par ses écrits, par le Prix Nobel qui l’honora. Les journalistes de nos médias oublient trop souvent les hommes de la science, à tort car cela participe de la désaffection de cette dernière. Ayant eu la chance de connaître ce savant fidèle en amitié, j’évoque ici quelques souvenirs qui mystérieusement reviennent à ma pensée selon des circonstances liées au fonctionnement cérébral qui reste quelque peu obscur.

Combien étais-je ravi et honoré de recevoir un jour un mail, un autre l’une de ses cartes enrichie bien souvent d’un dessin au trait, trace récupérée au hasard d’un cheminement dans ses pensées ou dans une allée du Jardin du Luxembourg. Evocation fréquente d’un imaginaire miroir de la beauté féminine, parfois humoristique, condensé de la pensée qu’il aimait ailleurs illustrer lors des nombreuses conférences qu’il fit pour les scolaires et les étudiants et, en ce qui me concerne, événement déclencheur de notre amitié. Le contenu de nos échanges épistolaires n’avait pas de direction obligée ni contrôlée, et pour cause : je ne suis pas physicien et lui s’intéressait à tous les domaines de la pensée. Dix ans ! Cent ans pour celle-ci :

montage photographique d’un recto-verso et d’une illustration de P.-G. De Gennes en date du 7-12-2005

… »J’ai déjeuné aujourd’hui dans un restaurant de la rue Laplace. Un des desserts avait pour nom « 17 mai 1917″. Le patron (Frédéric Bethe) m’a expliqué que son grand-père était au Chemin des Dames. Avant l’attaque du 17 mai l’artillerie devait battre les tranchées allemandes, en étant guidée  par des fusées lancées au dessus d’elles. Par erreur une fusée est partie droit au dessus des tranchées françaises : désastre. Parmi les survivants le grand père a eu le courage de ramper et d’envoyer une fusée depuis le côté allemand. Il a sauvé ses amis, mais il est revenu aveugle et amputé. … »

J’ajoute encore ce témoignage publié avec d’autres sur le site : « le complot des papillons » du journaliste scientifique Patrice Lanoy : témoignage pour P.-G. De Gennes

Pierre-Gilles De Gennes, 24 octobre 1932 (Paris) – 18 mai 2007 (Orsay)

Jardin des Poilus à Paissy

A Paissy, 34 rue de Neuville, le « Jardin des Poilus » sera ouvert le samedi 3 juin 2017 de 10 h à midi et de 14 h à 18 h. Même horaire le dimanche 4 juin 2017. Visite libre, des guides seront à votre disposition pour toute question et documentation.
Cette ouverture correspond au week-end national des « Rendez-vous au jardin » dont le thème de l’année est : ‘le partage au jardin’. Nous échangerons donc autour des écrits des soldats de la Grande Guerre qui concernent des plantes, ces dernières étant, autant que faire se peut, présentées au pied des panneaux documentés. Le partage se poursuivra encore par l’exposition de la plasticienne Céline Prunas qui suspendra des toiles ornées de gravures, ainsi que par un stand du Conservatoire des espaces naturels de Picardie animé par un scientifique du conservatoire et une représentante de la Communauté de Communes du Chemin des Dames.Jardin des Poilus à Paissy

Ronde du 15 mars 2017

Selon ce qui est quasiment devenu une habitude, voire une coutume, nous avons le plaisir d’accueillir pour la ronde du 15 mars la contribution de M.- Christine Grimard : ‘Promenades en Ailleurs’ — https://mariechristinegrimard.wordpress.com/

Le thème de la ronde s’appuie sur le mot « cuisine(s) et l’incipit : « ils vont où les oiseaux ? » Pour ma part je serai accueilli par Jacques, ‘la vie de Joseph Frisch’ : https://jfrisch.wordpress.com/

_______________________________________________________

« Ils vont où, les oiseaux, maman, quand l’hiver revient ?

Ils se cachent au fond de leur nid ?

Ils s’envolent jusqu’au bout du ciel ?

Ils partent pour les îles ?

Dis maman : ils vont où les oiseaux ? »

L’enfant, le menton dans les paumes, regarde l’oiseau noir posé sur la fenêtre de la cuisine. Le petit animal réchauffe ses plumes au premier soleil de mars. Il déploie ses ailes, les secoue puis les replie. Il regarde sans crainte l’enfant qui l’observe. Au moindre geste inquiétant, il lui suffirait de s’envoler. Ses ailes sont sa planche de salut, elles ne lui ont jamais fait défaut. Mais il n’en aura pas besoin, il a vu le regard de l’enfant. Il sait qu’il l’aime. Il n’a rien à craindre.

L’enfant chantonne pour l’oiseau :

« Il est allé où, l’oiseau, posé là sur mon balcon ?

Il est allé dans les îles pour goûter à la vanille

Il est allé dans la plaine pour tricoter de la laine

Il est allé dans la brume pour lisser ses belles plumes

Il est allé sur la mer pour trouver des éphémères

Il est allé en forêt pour y cueillir des bleuets

Il est allé au marché pour trouver sa fiancée

Il est venu par ici pour devenir mon ami. »

Maman s’approche, le sourire aux lèvres. Son petit poète a bien du talent ! Il déroule les mots comme un peintre étale ses couleurs. Il entend son pas et se tourne vers elle :

« Ecoute, écoute, Mamounette, ma chanson pour l’oiseau !

Tu crois qu’elle lui plaira ? Tu crois qu’il m’aimera ?

Oh, il est parti…

Tu crois qu’il reviendra demain ?

Je voudrais qu’il soit mon ami ! 

Et toi, tu l’aimes ma chanson ? »

La mère entoure ses épaules de ses bras. Elle est si fière de lui. Elle lui murmure à l’oreille :

« Elle est très belle ta chansonnette mon poussin. Belle et douce comme ton cœur. L’oiseau l’aime beaucoup, je l’ai vu dans ses yeux. Il reviendra demain et les autres jours pour que tu lui chantes encore. Et il chantera avec toi, tu verras… »

L’enfant ferme les yeux. Il rêve qu’il vole avec l’oiseau. Il appuie sa joue contre le bras de sa mère. Elle sent si bon. Son parfum le berce, mélange de cannelle et de jasmin.

L’air est doux, on sent que le printemps arrive.

« Tu sens la fleur de sucre, maman. Tu sens bon comme le printemps ! »

« C’est parce que je t’ai préparé des petites surprises sucrées pour le goûter. Elles seront bientôt cuites, il suffit d’un peu de patience. »

L’enfant fait la moue. Il n’aime pas le mot « patience », un mot qui signifie qu’il faut attendre son plaisir. Un mot qui montre que l’on a du temps devant soi. Il sait qu’il n’a pas de temps à perdre. Il a tant de choses à voir, à entendre, à goûter. Il n’est pas sûr d’avoir tant de temps à vivre. Demain est si loin et le monde est si grand.

« Mamounette, claque tes doigts et ça sera prêt ! »

Maman sourit. Elle jette un coup d’œil vers le four où des cannelés dorés caramélisent doucement. Encore quelques minutes et la cuisson sera parfaite, ils seront craquants à extérieur et moelleux à l’intérieur, doux et savoureux comme le miel à peine sorti de la ruche.

« La cuisine c’est de l’amour et c’est aussi du plaisir à partager, toi et moi. » dit-elle en berçant l’enfant.

« Ta cuisine c’est de la magie, Mamounette. Répond l’enfant. Tu mélanges des choses bizarres dans un grand pot, tu claques des doigts et c’est parfait ! »

« Même la magie a besoin de temps, mon poussin. Une grande dame nommée Colette qui aimait les animaux autant que tu les aimes, disait : « Si vous n’êtes pas capable d’un peu de sorcellerie, ce n’est pas la peine de vous mêler de cuisine. »

« Tu vois, dit l’enfant, j’avais raison. Ta cuisine, c’est de la magie ! »

Maman, sort les cannelés du four. Un parfum de sucre mêlés de fleur d’oranger embaume la cuisine. Le regard de l’enfant est doux comme le goût du plaisir qu’ils partageront bientôt. Elle n’oubliera pas ce regard, celui de l’amour infini qu’ils ont l’un pour l’autre. Un amour plus fort que le temps.

L’homme pose le sachet sur la tablette. La vieille dame se redresse sur ses oreillers. Elle regarde ce grand jeune homme et le trouve très beau.

« Vous êtes très beau, jeune homme, lui dit-elle. Qui êtes-vous ? »

Il ne relève pas, lui sourit et sans se décourager, lui dit :

« Regarde, Mamounette, je t’ai apporté des cannelés. Ils embaument la fleur d’oranger. »

Sa mère ouvre le sachet. Elle se délecte du parfum qui s’en dégage. Son regard pétille. Elle sort un cannelé et le tend au jeune homme, puis se ravise, le dévisage et lui dit :

« Tiens mon poussin, ils ont l’air très bons ces cannelés. Je ne me souviens pas les avoir sortis du four, même s’ils sont encore tièdes. Tu t’es bien amusé à l’école aujourd’hui ? Raconte-moi pendant qu’on partage le goûter. Après, on ira voir si l’oiseau est revenu pour écouter ta chanson. »

L’homme la regarde, un peu interdit. Voilà bien longtemps qu’elle n’avait pas prononcé autant de mots à la suite. Elle ne parlait plus depuis quelques semaines. Il prend le cannelé qu’elle lui donne et le pose au coin de la table, puis la serre dans ses bras et l’embrasse. Elle se blottit contre lui. Il fait durer l’étreinte, il est inutile qu’elle voie les larmes qui coulent sur sa joue. Puis elle s’écarte de lui et dit :

« Tu vois, mon poussin, Colette avait raison, la cuisine c’est de la sorcellerie ! ».

Texte et photos : M. Christine Grimard

« Villedo », l’île de Sumbawa et le volcan du mont Tambora

Comment peut-il y avoir un rapport quelconque entre deux lieux si éloignés, l’un dans le département de la Marne en France, l’autre dans une île d’Indonésie au nord-ouest de l’Australie ? La notion de globe rapproche ces entités géographiques dans la mesure où notre terre est un système, une biosphère, dans lequel une modification locale d’importance affecte l’ensemble.

Villedommange

Villedommange sous la neige, fusain J.-P. Boureux 2009

Comme aurait ouvert Clémenceau : de quoi s’agit-il ? Nous sommes en 1815 et, bien loin de la « Montagne de Reims, entre en éruption le volcan Tambora, puissante explosion, la plus importante des cinq derniers siècles. Le mont s’est effondré d’environ 1400 m et la base de son cratère, la caldeira, avoisine quatre kilomètres de diamètre. Le dégagement de gaz, lave, cendres sulfureuses est considérable et se répand très haut dans l’atmosphère terrestre. Le climat est modifié pour au moins trois années, avec une baisse moyenne de 1 à 3° des températures, selon la circulation des masses d’air, l’incidence des rayons solaires et la proximité des faits. 1816 est connu comme étant « l’année sans été« , l’éruption principale ayant eu lieu entre le 5 et le 10 avril 1815.

localisation approximative des lieux cités dans l'article

localisation approximative des lieux cités dans l’article

Après la lecture d’un article de Nathaniel Herzberg dans Le Monde ‘Sciences et Médecine’ du mercredi 25 janvier 2017 qui relate les travaux de Karen Alexander de l’Université du Massachusetts à Amherst relatifs à la modification des pratiques de pêche dans le golfe du Maine suite à cette éruption volcanique géante, j’ai idée de vérifier une éventuelle incidence en Champagne. Or nous disposons de plusieurs éléments quantifiés quand il s’agit des vendanges.

A ‘Villedo’, comme on raccourcit ici en lieu de Villedommange, une source documentaire d’un grand intérêt est « le Livre vert » dont la rédaction fut entamée par un paroissien en 1776 et jamais arrêtée totalement. En 1995 un oncle de ma femme, Pierre Dhuicq, constatant l’état de vétusté avancée du registre, prend alors pitié de l’ancêtre à la mémoire d’éléphant et prend contact avec votre serviteur, qu’il sait amoureux des antiquités bavardes -à l’écrit. Alors chargé de mission du Président de l’Université de Reims-Champagne-Ardenne, Jean Rémond, dans le cadre de la première évaluation nationale de cette institution, je prends en considération le malade et sollicite l’intervention complémentaire du Président du Conseil Général Albert Vecten. Ensemble nous imposons au malade une cure de rajeunissement qu’il accepte, sous condition d’être soigné par le relieur rémois expert et reconnu, Laporte, relieur-doreur, rue Maillefer, à Reims. Aujourd’hui chacun se félicite de l’ouvrage, si l’on peut dire et le « Livre Vert » continue sa vie dans les mains des paroissiens de Villedommange et villages réunis qui relatent les éléments majeurs de la vie locale, à la suite de leurs ancêtres. Des copies ont été déposées à la Bibliothèque municipale de Reims, Carnegie et aux Archives Départementales de la Marne.

livreverttxttitrew

article de l'Union après remise du nouveau Livre Vert le 15 décembre 1990

article de l’Union après remise du nouveau Livre Vert le 15 décembre 1990 et au-dessus Incipit de l’ouvrage en 1776 par Gérard Philippart, marguillier

On lit dans ce grand registre d’environ 42 x 32 x 2,5 cm et 203 pages, relié en vert comme il se doit, que les vendanges de 1815, 1816 et 1817 ont été calamiteuses. Je cherche donc à élargir ce point de vue étroit et consulte l’ouvrage de Benoît Musset, Vignobles de Champagne et vins mousseux, histoire et mariage de raison : 1650-1830, Fayard, 2008. Dans cet ouvrage figure deux diagrammes des rendements entre 1674 et 1830 : l’année 1816 est la plus sinistrée de toutes les données relevées dans différentes sources. Point de doute désormais, l’éruption du mont Tambora a bien provoqué un refroidissement généralisé du globe terrestre. Que ceux qui doutent de l’effet des rejets dans l’atmosphère, quelle qu’en soit la cause, prennent conscience que tout phénomène, anthropique ou naturel, qui modifie les basses couches de l’atmosphère entraîne des modifications importantes du climat.

Ronde de novembre 2016

Comme il est devenu coutumier nous poursuivons cette ronde qui semble sans fin, lors de riches échanges amicaux. Ce mois j’ai le grand plaisir d’accueillir Hélène, de http://simultanees.blogspot.fr/                                        qui en des circonstances tragiques pour moi, me fait l’honneur et le plaisir de rédiger quelques lignes en mémoire d’un frère récemment décédé. Lisons.

En mémoire de Michel Boureux

__________________________

Il était 5 heures du soir, à Poitiers

Il est des regards que l’on n’oublie pas, venus du fond des âges. Nous nous regardâmes. Face à face silencieux qui faisait oublier la violence des spots, rêver de lumières filtrées par d’étroites ouvertures, de chandelles aux flammes vacillantes. Sous le pinceau du temps, la peinture écaillée de ses yeux grands ouverts apportait des éclats de vie. J’aimais ces cernes rouge d’ocre, la coiffure arrêtée d’une ligne, narines et bouche peintes. Stuc et chaux en mélange et enduit. Des prophètes dit-on, venus de plus loin encore, d’autres temps en rebonds, de l’orient en passant par Ravenne, comme flèches décochées dans l’espace et le temps, portant sur volumen la parole sans voix.

vers l'infini du temps

Musée Sainte-Croix de Poitiers, 8 novembre 2016, en provenance des fouilles de Vouneuil-sous-Biard, un ensemble exceptionnel de 2500 fragments, VIème siècle.

Le stuc, visage oublié de l’art médiéval, catalogue d’exposition sous la direction de Christian Sapin, Somogy, 2004

Notre ronde suit cette fois ce mouvement :










Franck etc.

Ronde d’avril 2016

J’ai grand plaisir d’accueillir ce mois une réflexion de Jacques, « Un promeneur » sur le thème « Fenêtre(s). Notre ronde tourne selon ce cercle de liens :

Guy :  Emaux et gemmes des mots que j’aime   http://wanagramme.blog.lemonde.fr/
Elise : même si,    http://mmesi.blogspot.fr/
Céline : mes esquisses,   http://mesesquisses.over-blog.com/
Dominique : la distance au personnage,   http://dom-a.blogspot.fr/
Franck :  quotiriens,        http://quotiriens.blog.lemonde.fr/
Jacques  : un promeneur,    http://2yeux.blog.lemonde.fr/
Jean-Pierre : voir et le dire, mais comment ?  http://voirdit.blog.lemonde.fr/
Noël : le Talipo ,  http://www.talipo.fr/
Hélène : simultanées,  http://simultanees.blogspot.fr/

Suivons notre « Promeneur » :

   Il y a ce bruit amer, grinçant, râle et soupirs de l’arrivée du train à Túpïnk sous le ciel raide , acier, il a vu au bord des rails, ces murs rougis, rouillés, et ressenti le caractère inéluctable de ce voyage peut être inutile vers l’oubli. Très vite ensuite ses pas qui sonnent dans des rues, leur rythme ample puis hésitant et parfois les arrêts quand Markovski lit le nom des rues au carrefour, puis revient au plan qui se déchire entre ses mains, puis de nouveau lit le nom, novice dans cette langue barbare qui blesse les lèvres, syllabes ferrailles. Ne pas vouloir interroger les passants de rencontre, user quand il le faut de quelques mots d’anglais, éviter les grandes rues, se méfier des caméras et des gens : souvenez vous de ça  ils savent remonter  n’importe quelle piste

(et aussi) ce souvenir qui flotte, saigne, blesse : elle autrefois loin dans l’espace et le temps, elle et lui plus jeunes, tellement plus jeunes. Ce souvenir qui raye les flancs  de sa mémoire, l’empêchant de passer à autre chose, faisant barrage (la masse brune de ses cheveux, de son corps ample, nue  et souriante qui s’avance : neuf ans …

RondeAvril2016Photo3WIls savent tout

Ne me demandez pas comment

& cet accent étrange  qui plus que tout lui plaît chez les femmes, comme une différence plus grande encore plus attirante (alors que celles d’ici, leur sécheresse, l’ abominable mimétisme appris à l’école, cette ribambelle de  portraits fin de siècle, décalques de visages avec leurs foulards vert ou bleu pâle, celui des filles de la côte, des vallées de la Knerre, ensuite dans l’autre pièce celles du plateau. Tandis qu’elle, solaire, espagnole ; Sotomayor

Un homme traverse une ville de la province du nord-est : c’est une fin d’hiver, il doit retrouver une femme et la tuer. Est-ce pour le compte d’un autre qu’il doit agir ? Ou bien a-t-il simplement besoin de la revoir une dernière fois pour peut-être tuer en lui-même le souvenir, ou encore s’agit-il  de renouer avec elle, oubliant que c’est lui-même qui a rompu le lien de leurs années d’études ?

RondeAvril2016Photo2Wle trajet de la balle # 1 : orifice d’entrée à 2 cm en DD de l’omoplate D, perfore l’Alexandre pulmonaire, ricoche sur la face interne du sternum, traverse le ventricule D et termine dans la plèvre inf D ; projectile #2 : entrée 25 cm en dessous du #1 fracture le pôle sup du rein D puis cisaille le lobe inf. du foie, trajet légèrement ascendant, montrant que la victime était en train de chuter lors de ce 2nd impact pour atteindre la ville, la route à voie unique serpente à travers d’immenses rouleaux de brume froide que le vent d’Ouest fait monter sur les contreforts boisés jusqu’à la crête où ils se tiennent un instant en équilibre pour dévaler ensuite, disparaissant dans le vide bleuté vers la zone industrielle du Platt, alors qu’au dessus, le ciel de l’aube devenait orangé puis rose alors que S. dormait maintenant la tête appuyée sur son épaule, et derrière la petite jouait silencieusement avec de figurines en bois peint, animaux aux visages presque humains mimant la colère, le rire, l’étonnement, la peur ou le sommeil,etc.

Un personnage hypermnésique

Avec le temps son visage défait: des sourcils restés sombres mais des tempes blanchies, annonce d’une défection de la chair, de forces en diminution, rongées par le temps pense-t-il en se regardant dans le miroir des toilettes de la gare de  T… (divers procédés chez les peintres comme Samuel Desogues (1760-1791) dont on sait qu’il fut amputé du bras droit, qu’il reprit par la suite la peinture, exclusivement de série d’autoportraits peints  de la main gauche mais tous anatomiquement faux (l’ensemble de ses tableaux antérieurs disparus ou probablement attribués à tort à …)

Mais alors que pensez vous de la philosophie ?

– ye pinse elle ne dicrit pas le monde réel, comment dire, elle …

– vous avez écrit que le roman surpasse la philosophie parce qu’il montre une pensée en action

– ye pinse touyours la même chose

Les caméras enregistrent tout : carrefours allées  de magasins, gares (des wagons jaunes), l’ensemble des véhicules de location équipés de puces de géolocalisation si bien que tous les moyens de transport etc. (étincelles vertes au contact  des caténaires)

le ANG 23 est de fabrication tchèque, un 9mm à  balles ogivales blindées de 9×19 mm, avec une crosse en alliage d’aluminium bleuté, et une coque arrière en polymère moulé, les premières séries furent problématiques du fait d’un défaut dans l’acier utilisé, et qui rendait l’arme impropre à fonctionner lors de changements rapides de température

pensez que le livre ne s’arrêtera jamais et qu’on écrit sans arrêt jusqu’à la catastrophe finale : songez à  ce travail de Pénélope ou d’un architecte malade qui ferait et referait sans cesse le tissu la ville : son centre, les avenues puis jusqu’au plus petit quartier périphérique, jusqu’aux confins où quelques demi-paysans élèvent des poules et des lapins : clapiers de banlieue qu’on atteint en tram après deux heures de secousses métalliques, et aussi évitez une identification possible des lieux, circonstances où des personnes, pensez que les pages ouvertes pourraient être des fenêtres d’où on pourrait voir la multiplicité des visages du monde, millions de possibles issues et chemins

Les deux coups de feu ont été tirés depuis l’extérieur du bâtiment dans une certaine précipitation : l’inspection de la chambre ne révélera aucun détail particulier : au mur une photographie noir et blanc d’un port grec dans les années 60 (Hydra ?) où plusieurs chats sont assis le regard fixe dans la direction d’un bateau qui arrive, dans une attitude de sphinx, et sur le dessus de lit satiné la gigantesque tache de sang qui rappelle vaguement une carte de la Pologne, par on ne sait quelle transformation chimique tout ceci a pris en quelques heures une couleur noire

Ils savent tout

Il hésite :

Markovski (M) est en fait un agent des services secrets turcs : la raison du meurtre – le mobile si on veut – est de provoquer la colère des arméniens de France car Christina Boghosian (B) est considérée comme proche d’une organisation paramilitaire, et sa disparition devrait amener les dirigeants à sortir de l’anonymat et donc à quitter la protection de l’état français

  1. Le mobile du meurtre est une dette de jeu qui reste impayée, le père de B et celui de M ont tous les deux été de riches entrepreneurs sur la Côte d’Azur quelques années auparavant
  2. ou bien il est question d’une transaction malhonnête puisque un terrain à été acheté à bas prix pour construire un ensemble social alors le projet final comporte des hôtels de luxe et un complexe de bureaux pour une sorte d’hôtel d’entreprises

« The war for the preservation of the union » (il entend whore – preservative – onions) et regarde la jeune fille en sweat-shirt au nom de la Grande Université qui bavarde et ondule , agile et spirituelle, légère, mutine et agaçante avec devant elle des visages asiatiques de tous les âges attentifs et occupés, terriblement sérieux , Mon Dieu que la whore est jolie !

Elle était morte ensevelie dans le sommeil, la ville aussi ensevelie, assommée sous des masses de nuages qui roulaient, Rubens ou Boucher etc.

la liberté de tout dire ou seulement un peu

Sur la droite des maisons de meulière, un long viaduc à quatre arches, une pente vertigineuse et des reflets de verre glauque et d’aluminium à chaque extrémité du bâtiment une élévation vitrée au toit tronconique, au loin quand la brume se levait on voyait la colline de V.

Il parle doucement puis sa voix enfle, il crie je ne veux plus jamais te voir JAMAIS TU M’ENTENDS JAMAIS JAMAIS PLUS JA elle le regarde méprisante , comme un authentique malade puis tourne le dos et s’en va

Ils savent tout d’avance, mais vous gardez le pouvoir de dire, vous êtes propriétaire d’un peu de silence.

RondeAvril2016Photo1WDans le même temps, grand merci à Noël Bernard, « le Talipo » de nous accueillir en ses pages, et aux organisateurs de cette ronde de permettre cet échange.

Liste des blogs ayant participé à cette ronde :

 

Bois des Buttes 17 mars 2016

Excellente initiative que cette commémoration du 17 mars 2016 devant la stèle « Apollinaire« , appréciée des amoureux de la langue française et de tous ceux qui ressentent une certaine empathie envers tous les hommes de souffrance qui eurent à fréquenter le Chemin des Dames en ses heures tragiques. Aujourd’hui encore des entonnoirs ou plus modestes trous d’obus parsèment ce « Bois des Buttes » situé entre Pontavert et La Ville-aux-Bois-les-Pontavert, trois petites buttes âprement disputées entre Français et Allemands tout spécialement en 1914 et 1916.

EscalierW

La Ville-aux-Bois depuis la tour d'observation de Craonne

La Ville-aux-Bois depuis la tour d’observation de Craonne

BoisButtesTrouObus2015WQuelques phrases utilement prononcées ont replacé et le poète et le lieu dans leur contexte historique et culturel. Des sons de cordes frottées se sont mêlés à ceux du très léger murmure des branches du sous-bois. Recueillement et remembrance. Puis dans le ciel azuréen se sont envolés des ballons porteurs des vers ou phrases du poète que des élèves du Collège de Corbeny avaient sélectionnés, après en avoir prononcé quelques autres devant le public.

StelleAppoPeinture2W

Comme un clin d’oeil de l’artiste Laurent Tourrier ou celui d’Apollinaire vers nous, le temps ne compte plus…

ViolonW SteleAppoPeintureW ElevesW Ballons2W Ballons1WCent ans après jour pour jour, quasiment heure pour heure… des gestes et des mots simples pour tenter de dire, de rappeler l’indescriptible. Ce qu’avait déjà accompli Yves Gibeau ici en 1990, ce qu’il a aimé et tenté de faire partager urbi et orbi sur la surface du Chemin des Dames, spécialement dans les dernières années du XXe siècle. Je me remémore une discussion à bâtons rompus autour d’une table dans un restaurant rémois lors de l’une de ses interventions pour les lycéens de notre lycée, en compagnie de quelques collègues.  Sur le marbre il a aussi sa place, quand il repose plus haut et plus au nord de ces trois buttes, dans le petit cimetière de l’ancien Craonne, autre butte ensanglantée.

DonGibeauW SteleAppolinaireIntroTxtWL'as-tu vu Gui

TombesVxCimW

cimetière du vieux Craonne

la tombe d’Yves Gibeau toujours fleurie, parmi des tombes de l’ancien cimetière de Craonne, village totalement détruit et reconstruit à son pied après la Grande Guerre ; photographie du 16 avril 2015

Naguère, encore élève du lycée de Soissons, approchant pour la première fois l’écriture de Guillaume, vers 1964, j’avais ciselé dans le cuivre d’un plateau de balance Roberval l’un de ses poèmes de ‘Calligrammes’, Le jet d’eau :

PlateauEntierW plateau de balancepour approfondir :

La lettre du Chemin des Dames, n°36, mars 2016, plus spécialement l’article de Guy Marival, p. 6-10